C'est toujours avec le même plaisir que j'écris et partage avec vous, les chroniques de Thérèse Vous pouvez retrouver la dernière sur le site de la Dépêche, dans les pages du dimanche de Béatrice Bordonada.
Venise a son carnaval, Mauléon-Barousse aussi ! Dans notre vallée, cette divertissante journée est sur toutes les lèvres, notamment sur celles des benjamins. Le froid de l’hiver n’a pas entièrement disparu, pourtant les adultes sont rassurés, conscients que leurs enfants seront rapidement réchauffés par l’enthousiasme et l’agitation de leur jeune âge.
Le temps d’un refrain, chacun portera sur ses épaules le costume qui le transformera en quelqu’un d’autre. Confectionné avec soin, emprunté dans une armoire, chiné dans le grenier ou pour les plus chanceux, acheté dans un beau magasin, chacun s’inspirera de son environnement familier ou de son monde imaginaire pour enfiler son déguisement fétiche.
Chez ma grand-mère, les tableaux accrochés sur les murs, représentant les Glaneuses et l’Angelus de Millet, créent une évidence dans mon esprit. Vêtue de mon accoutrement, je rejoins mes camarades. Qui est qui ? Je lève des yeux admiratifs sur un marin épris de voyage, un berger sans son troupeau, une mariée remplie d’espoir, un sympathique vagabond, une jolie majorette, un puissant Goldorak, un habile Spiderman, une demoiselle coquette, un amusant petit clown… Nous voici prêts pour défiler, sous les regards conciliants des doyennes du village, Adrienne et Adèle.
En route, mauvaise troupe ! Nous déambulons à travers les quartiers. Du Sourtaou, au Pont de pierre et au Satou, nous grimpons jusqu’en Sartigue, puis revenons sur nos pas, pour marcher tranquillement le long du Pujo. Courage, il reste encore Sahorge et Sascale, mais il ne faudra pas nous en demander davantage, nous oublierons les Pradettes ! Les Mauléonnais nous accueillent chaleureusement en nous offrant des friandises ou des pièces de monnaie qui nous permettront de préparer un bien délicieux goûter. Cette année, il sera englouti chez Xavier, le garde forestier. Dans son uniforme kaki, il nous ouvre sa porte sur un bon feu qui brûle dans sa cheminée, avec le refrain d’une chanson qui résonne jusqu’à nos oreilles : « … et s’appelait, les copains d’abord, les copains d’abord ! » [1]
Xavier s’émerveille de notre candeur. Des miettes de gâteaux s’étalent sur son parquet, mais le désordre n’a pas l’air de l’importuner. À nos côtés, il retrouve l’innocence de ses dix ans. Pour immortaliser ce moment, il nous propose de prendre une photo et lorsque nous sommes serrés les uns contre les autres, sagement cadrés, il appuie sur le bouton de son étrange instrument. Ouistiti !
Ce jour-là, nous apprenons à développer des clichés dans sa chambre noire et nous repartons enchantés, avec le souvenir de nos exploits et de ce moment de bonheur partagé.
Marie-Carmen, Jérôme, Karine, José-Louis, Delphine, Cédric, Bénédicte, Bruno, Laurent… rendez-vous dans dix, vingt, trente ans… sur la place des grands hommes ! la nôtre, celle de Palouman !
[1] Georges Brassens, Les copains d’abord.
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