Chronique du mois de mars, publiée dans la Dépêche.
Dans mon village, coule une rivière. De son murmure, elle berce nos nuits. Ce chant des sirènes à jamais nous ensorcèle.
L’hiver, elle grogne, l’été, elle gazouille. Ses jambes s’allongent, l’une depuis Sost et l’autre depuis Ferrère, pour se rejoindre à Mauléon-Barousse. Ses cheveux ondulent jusqu’à Loures-Barousse, où elle se jette avec entrain dans la Garonne.
Depuis la place de Palouman, qui n’a jamais tenté le diable en remontant son cours d’eau ? Sauter de pierre en pierre, glisser sur la mousse verdâtre, jouer à l’équilibriste sur des troncs d’arbres échoués et se jeter avec témérité dans ses piscines glacées en s’égosillant. Admirer avec béatitude la cascade qui s’écoule le long de la paroi rocheuse, tout en s’éloignant des noirceurs effrayantes de la bouche béante du Gouffre de Saoule. Nous baigner dans Le temps des secrets !
« L’Ourse », c’est le sang dans nos veines, la vivacité dans nos cœurs, le nectar qui abreuve nos troupeaux, le rêve de nos pères de pêcher les truites sauvages qui grouillent en elle, c’est aussi la larme sur la joue de ma mère, si loin de ses Pyrénées. Partout ailleurs, longtemps j’ai cherché sa mélodie. Celle-là même qui faisait sourdre des souvenirs de mon enfance, entraînant dans son flot harmonieux, l’espoir d’un avenir accompli, qui cela va sans dire, affluerait jusqu’à un océan de bonheur.
Si ma vie est plaisante à ce jour, je ne peux m’empêcher de penser aux âmes en peine, aux souffrances intérieures, souvent dissimulées derrière des sourires de convenance. M’est avis qu’une oreille accoutumée à écouter les complaintes de la nature, serait à même d’apporter du réconfort et de la lumière aux rêves désenchantés. Comment rassurer l’ami, en la confiance de ses bras ouverts ? Serait-ce tout bonnement en abandonnant dans le courant, tout esprit de compétition, stimulé par les relents d’un ego torturé ? Retrouver finalement la spontanéité de l’enfant que nous étions et sa relation à l’autre.
Et le ruisseau poursuit son chemin…
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